Changer de vie, devenir paysan ?

Qui ne se pose pas la question du sens de sa vie ? Pour nous ce fut évident. Voici un petit chapitre sur l’installation car nous avons été sollicités à plusieurs reprises par message, par des personnes qui s’interrogeaient : « concrètement comment on fait pour s’installer ? A quel âge ? quel est votre parcours ? des conseils ? … ». Alors voici quelques éléments de réponse :

Le chemin que nous proposait la société ne nous convenait plus. Quel but et quel sens donnait-on à notre vie ?

Cette remise en question nous a pris du temps, a semé des doutes et des peurs… Chaque parcours est différent, et envisager de quitter ce que l’on connait, pour partir vers l’inconnu, n’est pas évident. Surtout lorsque la société et notre entourage nous observent. Même si ce n’est pas explicite, la pression est là. Le voyage nous a beaucoup aidé à nous connaitre, à sortir de notre zone de confort, pour savoir ce que l’on souhaitait faire réellement.

Toutefois, à ce stade, on sait ce que l’on perd, mais on ne sait pas ce que l’on va gagner… Sachez que nous n’avons aucun regret ! Vivre en accord avec ses valeurs, ne plus se mentir, être à sa place dans le monde, faire quelque chose de bon pour soi, pour les autres, pour la nature, avoir envie de se lever le matin, vivre dehors au grand air, faire quelque chose de ses mains, être son patron, donner du sens à sa vie…

Tout cela c’est l’image que peut renvoyer le monde des « néoruraux ». Et tout cela est vrai (de notre point de vue). C’est pourquoi nous ne pouvons que vous encourager à vous écouter, et à tenter l’aventure.

Mais attention, tout n’est pas idyllique. Les métiers agricoles et le parcours à l’installation ne sont pas faciles.

C’est pourquoi avant de vous lancer dans le bain, nous vous conseillons de vous tester !

Pourquoi ? Car être paysan ne correspond pas à tout le monde. Il faut savoir si physiquement vous êtes capables de travailler, dehors, sous la pluie, dans le froid ou le chaud, si la vie loin de la ville vous convient, si le manque de confort est un frein etc… De plus chaque métier de paysan est différent, et est un univers à part entière.

Maraichage, paysan boulanger… mais pas que ! Apiculteur, éleveur de vaches, de chèvres de brebis, laitières ou non, poules pondeuses, arboriculteur, paysan brasseur, plantes aromatiques et médicinales … L’avantage c’est qu’il y en a pour tous les goûts. Ainsi il est essentiel de savoir vers quoi aller, en fonction de vos affinités. Et pour cela rien de mieux que l’expérience du terrain. Car entre l’idée que l’on a d’un métier, en feuilletant des bouquins, en regardant des vidéos, et la réalité du travail quotidien, parfois 7 j/7j, cela peut-être bien différent.

C’est pourquoi, via le woofing, des stages et du salariat, vous pourrez réellement appréhender le métier. En maraichage il serait judicieux d’avoir fait au moins une saison complète de salariat avant de se lancer par exemple. Il est important de préciser qu’il y a une grande différence entre du woofing, des stages et du salariat. Le rythme et l’exigence demandée n’est pas le même, le salariat se rapprochant plus de la réalité.

Ensuite la formation peut aussi s’avérer utile et propice au murissement du projet, d’un point vue technique, économique… Nous avons fait un BPREA (Brevet Responsable d’Exploitation Agricole) à Brens (81), ce n’est pas la seule possibilité. En revanche notre BPREA était spécialisé en Paysan Boulanger pour Gaël, et Maraichage pour Claire, le tout en bio. Ce qui est réellement un plus. Le BPREA nous a permis de comprendre le parcours à l’installation, ses étapes, ses acteurs etc… Nous avons rencontré d’autres élèves : des personnes entre 25 et 50 ans qui cheminaient comme nous. Cela nous a permis d’échanger autour de nos projets, de comparer, d’apprendre… Lors du BPREA nous avons visité de nombreuses fermes et beaucoup d’intervenants sont venus. De quoi remettre en question son projet 20 fois, et de découvrir de nouvelles pratiques.

Le BPREA nous a aussi permis de monter l’étude économique du projet. Et cela est un point clé : on pose le projet à l’écrit et on vérifie sa faisabilité. En maraichage cela signifiait notamment faire son plan de cultures, en fonction de la quantité que l’on veut produire, de sa surface, des débouchés. On liste les investissements, les charges, on fait des devis etc… Bref c’est un gros travail de « débroussaillage » qui permet de passer de l’idée à la concrétisation.

Mais d’autres organismes font un travail similaire, comme les ADEARS, qui proposent des un accompagnement, sous différentes formes : parcours d’aides à l’installation, avec des heures de formation et des stages pratiques, formation, café installation, journées d’échanges, stages longue durée etc… Nous vous conseillons de prendre contact avec eux car ils peuvent vous renvoyer vers d’autres acteurs en fonction du stade de votre projet… La Chambre d’Agriculture est aussi là pour répondre à vos questions.

Chaque parcours d’installation est unique. Le nôtre a pris 3 ans entre notre première vraie expérience chez des agriculteurs (salariat pour Claire et Woofing pour Gaël), et notre installation à La Ferme des Sailles. En gros on peut résumer cela comme ça : 1 an d’expérience pro + 1 an BPREA (en alternance) + 3 mois de recherche de foncier + 9 mois de montage de dossier sur la ferme / expérience pro dans le même temps.

Pour l’accès au foncier, nous avons sollicité Terre de Liens, qui a acheté la ferme. Nous sommes donc locataires des terres et de la grange, ce qui a nettement réduit notre endettement.

Ensuite l’installation en tant que tel est un autre gros sujet. On a beau s’y préparer il faut le vivre pour le comprendre. Le travail est très très intense, surtout les 3 premières années. On met toute sa vie entre parenthèse pour ne se focaliser plus que sur notre projet, notre ferme et ces milliers de tâches à accomplir… Il peut y avoir des moments de découragement dus, à la fatigue et au surmenage; de doutes à nouveau : était-ce vraiment ce que l’on voulait comme vie ? Courage et persévérance sont deux attributs pour ne pas tout lâcher. Car au bout de cette montagne de travail il y a le rêve qui se réalise, qui se créé, et qui se renouvelle. Et la joie de voir son jardin prendre forme, les premiers pains sortir du four, de pouvoir « agir » sur un lieu en plantant des arbres par exemple, la gratitude exprimée par nos clients, visiteurs, le partage avec nos stagiaires et woofers… tout cela nous fait réaliser que ces efforts en valaient la peine. Se sentir pleinement en harmonie avec le monde autour de soi, se réaliser, et continuer à avancer avec des projets pleins la tête. Car une ferme vit, bouge, évolue, comme la nature !

Liens vers les Adears + Terre de Liens

http://www.jeminstallepaysan.org/accompagnement-adear

https://terredeliens.org/annonces.html